Le gris cogne à la fenêtre. Il est là, tout près, dans les salissures noirâtres de l'immeuble d'en face, dans la pluie verticale qui vient fouetter les vitres, dans le froid perçant qui me paralyse les doigts. C'est l'automne maintenant. Je ne me rappelais plus combien ça peut être triste un automne. Est-ce la saison en elle-même qui est triste, surtout lorsqu'elle se met à crachouiller tout ce gris humide sur les trottoirs, ou bien est-ce la perspective que ce sera désormais ainsi pour les six mois à venir qui rend morose ?Suave mari magno : il fait bon, paraît-il, d'être tranquillement à l'abri lorsque les intempéries se démènent à l'extérieur. Seulement ici, entre nos quatre nouveaux murs, il fait froid. Rageuse découverte hier lorsqu'on s'est aperçu que, bien que toute notre installation chauffage et eau chaude soit au gaz, il n'y avait tout simplement pas de gaz dans l'immeuble ! Ce n'est pas croyable qu'une agence immobilière puisse proposer à la location (et faire payer très cher pour cela) un appartement dont les installations les plus fondamentales ne sont pas achevées, mais aujourd'hui, l'incroyable est devenu commun. Hier, j'ai passé toute la journée au téléphone, à joindre EDF-GDF, tombant à chaque fois sur un agent différent ne comprenant pas plus le problème que moi et, via de multiples appels à l'agence, les harcelant pour avoir un rendez-vous de toute urgence. Mais le terme d'urgence semble être un mot relatif, étant donné que personne ne peut passer avant vendredi. "Mais Madame, puisqu'on vous dit qu'on a fait tout notre possible et qu'on n'a pas pu avancer le rendez-vous !" m'a-t-on rétorqué au téléphone, un brin excédé, inversant royalement les rôles puisque l'expression de l'énervement devrait plutôt venir de moi, la cliente lésée. O. de son travail, moi de l'appartement avons continué à insister encore. On nous a promis que quelqu'un envoyé par l'agence passerait le lendemain, "dans l'après-midi (rendez-vous bien vague qui m'oblige à rester toute l'après-midi à l'appartement). Tout à l'heure, le type est venu. Il m'a emprunté un tournevis, a regardé la colonne de gaz et a dit : "ben oui, il y a une colonne de gaz, mais il n'y a pas de gaz dedans". Merci du renseignement, cher Monsieur. La conclusion de toute cette histoire, c'est que depuis une semaine qu'on a les clés de l'appartement, il n'y a toujours ni eau chaude ni chauffage. Pour prendre des douches, il nous faut sauter dans la voiture pour retourner chez nos parents, et moi qui passe mes journées au téléphone à appeler GDF, j'ai dû sortir mes affaires de montagne pour m'envelopper toute entière et me protéger du froid.
Je n'ai qu'une hâte : que ce soit le soir et que mon chauffage humain revienne me serrer dans ses bras. GDF n'est pas capable de nous fournir la chaleur au gaz. Heureusement qu'O. peut, à lui tout seul, me donner la chaleur humaine...