Je suis désolée, je néglige un peu tout et tout le monde en ce moment - à commencer par toi et par nos lecteurs. C'est que la fin du trimestre est difficile. Professeurs et élèves sont tous essoufflés, mais pourtant il faut continuer à courir. Derniers devoirs à corriger, moyennes à calculer, bulletins à remplir, conseils de classe à préparer. Si en plus de cela tu rajoutes les cours à composer, car depuis la rentrée je n'ai quasiment pas encore réussi à avoir suffisamment de temps pour préparer un seul cours à l'avance et ne pas avoir à l'improviser la veille au soir... Bref, je suis débordée. Je déborde de toutes parts, luttant pourtant par des efforts inespérés pour rester à la surface. Mais nager dans des eaux agitées qui menacent dangereusement de submersion n'a rien de bien excitant. A défaut de trouver une terre ferme (qui restera toujours un mirage de naufragé, je ne me fais pas d'illusion), j'aimerais cependant que les eaux dans lesquelles je me débats soient remuées par d'autres vagues que celles du travail. Pour répondre à cet appel du grand large, je me suis dit, samedi matin, que décidément il fallait que je sorte de mon exil et que j'arrête de refuser toutes les invitations des gens civilisés que depuis trois mois je ne me donne même plus la peine de voir. Alors j'ai passé quelques coups de fil, envoyé quelques e-mails, et sauté dans le premier train pour Paris. Seulement mon expédition dans la capitale s'est plutôt révélée un naufrage presque complet. Samedi après-midi, j'avais prévu de voir une amie. Mais malheur à moi - et honte aux technologies modernes de ce foutu monde prétendu civilisé : nous avions convenu de nous rencontrer en se "parlant" par e-mail, sans fixer précisément de lieu de rendez-vous. Il ne faut jamais prendre un rendez-vous par e-mail, Fred, c'est moi qui te le dis ! Donc, projetée à Paris, je ne savais même pas où aller. Je pensais pourtant avoir la solution miracle : j'ai téléphoné à mon amie, sur son portable. Je déteste les portables. Mais l'amitié vaut bien quelques concessions. Seulement elle avait "oublié" de brancher le dit-portable. Au bout de deux messages désespérés sur son répondeur, j'ai abandonné. Qu'on ne me dise surtout pas que nous sommes dans le siècle de la communication. Du coup, je hais encore plus les portables. Ayant encore foi pourtant dans le téléphone, j'ai appelé une autre amie. Mais elle n'était pas chez elle. Et je n'ai pas osé faire tout le reste de mon carnet d'adresses : le coup du "je suis à Paris et ché pas quoi faire, tu m'héberges ?", c'est pas vraiment poli, non ? Résultat ? Résultat, j'ai dépensé tout mon argent dans les librairies du quartier latin. Au bout de trois librairies et quelques 600 F adroitement transformés en pages de lecture, je me suis dit qu'il fallait que je me calme. Mais pour me calmer je n'avais rien à faire. A part corriger des copies. Et comme ma carte de bibliothèque n'est plus valable, maintenant que je ne suis plus étudiante, j'ai été obligée de me réfugier dans un café. C'était moi la fille qui a passé son samedi après-midi à rougir des pages d'écolier, dans un café de la place de la Sorbonne. Tu m'aurais reconnue facilement. A sept heures, je me suis rendue à mon second rendez-vous (enfin, premier, car les rendez-vous fantômes ne comptent pas), dans un petit restaurant près de la rue Mouffetard. J'ai retrouvé des gens que je n'avais pas vu depuis cet été. Mais je ne peux même pas dire que c'était sympa et tout ça. Par un mouvement de foule incompréhensible, je me suis retrouvée tout au bout d'une table, tout au fond de la salle. Nous étions nombreux, très nombreux. Tout le monde parlait en même temps, chacun du côté de sa table. Mais moi qui étais à l'extrême extrémité du restaurant, je n'entendais strictement rien - à part un immense brouhaha. J'ai bien essayé de participer à la conversation des personnes autour de moi (c'est relatif, car j'étais loin de tout le monde). Je plaçais un bout de phrase ici et là. Mais ça tombait forcément à côté, car je n'entendais qu'un mot sur trois de la discussion de mes compagnons de banquet. Donc, au bout d'un petit moment, j'ai complètement décroché. Là encore j'ai abandonné. Le bruit me devenait de plus en plus insupportable. J'ai éprouvé l'immense besoin de sortir de ce calvaire, de me lever, de bouger, de respirer. Mais du fin fond de mon petit coin, c'était impossible de faire un seul geste. J'ai bien eu l'envie de me la jouer pub-pour-la-bierre (je ne sais plus le nom de la marque) : tu sais, comme la fille qui monte sur la table et qui y avance à quatre pattes. Mais j'ai pas osé quand même. Mon sens de la décence comme celui de la politesse m'a aussi empêchée d'appuyer mes doigts fermement sur mes deux oreilles. Dès le dessert avalé, j'ai lancé un regard désespéré à mes deux bonnes copines. La communication des yeux est encore la meilleure qui soit. Nous nous sommes levées le plus discrètement possible (c'est-à-dire que c'était pas du tout discret bien entendu), et, enfin, nous avons retrouvé l'AIR LIBRE. Voilà, donc conclusion ? Conclusion : à bas les téléphones portables, à bas les rendez-vous foireux, à bas les restaurants bondés, à bas les bouts de table. A bas le bruit aussi, à bas la foule... à bas les gens ? Non, Fred, je n'irais pas jusque là. Je n'ai pas si envie de retourner sur mon île. C'est juste que je n'aime pas perdre tout le temps et toute l'énergie que je mets à ne pas être submergée par ma vie dans des soirées comme celle-là qui tombent à l'eau. Et toi, Fred ? As-tu passé un meilleur week-end ? Eva.
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Mettre son réveil avant 5:00 un samedi : inhumain, non ? Le terminal F de l'aérogare 2 de Charles-de-Gaulle, sous une petite pluie fine ne sent pas le kérosène, pas plus qu'on y voit d'avions ; que du béton, nul !!! M. revient d'une mission avec M.S.F. La voilà, avec son chariot et ses bagages. Quelques embrassades plus loin, je sais déjà qu'elle est debout depuis notre jeudi minuit "à nous" en tenant compte du décalage horaire, qu'elle cherche un distributeur de billets, car à part les onze francs qu'elle vient de trouver dans sa veste que je lui ai apporté, elle n'a pas d'argent, que l'appareil trouvé est momentanément en panne et qu'elle s'arrête au guichet "Informations", pour ... je ne sais pas ! Mais elle m'explique. Et de retour dans ma voiture, nous voilà partis à discuter de cette drôle d'histoire bien compliquée. Comme je suis bien placé pour savoir que son frigo est vide, je lui propose de venir prendre le petit déj' chez moi. Et devant quelques belles tartines beurrées, pleines de confiture, elle revient sur ce médecin qu'elle connait depuis un an environ, ses venues en France, leur tentative (ratée) pour se voir à Moscou s'il avait pu quitter la Géorgie... des pays différents, des itinéraires différents, sans compter leurs cultures, leurs religions, etc... pas facile, tout ça !!! Mais M. poursuit ses confidences (je la soudoie en lui faisant de nouvelles tartines...), puisque je la connais assez bien pour lui dire que cette histoire lui ressemble : elle est compliquée ! Peut-être plus encore que la précédente avec son ami anglais, et elle rit en continuant : avant il y avait ce garçon canadien rencontré je ne me souviens plus où (j'avoue que j'ai du mal à suivre...), et avant encore (ou déjà !) un anglais, et même ses copains français, qui n'habitaient pas dans sa région... Bref, de quoi poursuivre cette discussion après le petit déjeuner, il faut bien que je la ramène à mon ex-appart', le sien, quoi... Voilà, à l'heure qu'il est, elle doit encore dormir ;-)) Puisqu'elle nous avait abandonné, on a du faire la fête sans elle, et couché aux aurores, c'est un joli petit rayon de soleil qui me réveille ce matin... il fait beau, un peu frais mais beau, les enfants ne sont pas là aujourd'hui, alors : rollers !!! J'habite maintenant plus près de la Bastille, d'où part la randonnée, et les rues par là sont fermées à la circulation automobile le dimanche et réservées aux piétons, aux vélos, aux poussettes, aux rollers, skate-boards et autres patinettes... Ca doit être sympa d'y aller... en rollers, non ? Bien sûr, mais alors, quelle après-midi ; parti vers 13:00, je suis rentré à 18:00, après 5 cinq heures passées à patiner... Le retour m'a semblé un peu long ;-) D'ailleurs, je crois que je vais aller me coucher aussi, moi !!! Bonne nuit, Eva. |
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