Lettre d'un jeune homme sentimental à une inconnue Mademoiselle, Je me rends compte de mon audace inouïe : je tremble en songeant à ma témérité, mais je sais que, belle comme vous êtes, votre coeur doit être sensible ; il sera accessible à la pitié et vous écouterez ma prière avec indulgence. Je vous aime ! oui, je vous adore à la folie et vous êtes réellement l'idéal que toujours j'ai rêvé. Je ne croyais pas qu'une pareille perfection existât sur la terre. Oh ! vous voir encore, vous parler !... qui sait ! peut-être ne pas vous déplaire ! Quel espoir ! Je n'ai eu que deux fois le bonheur de vous rencontrer ; la première fois, c'était dans le Métro ; j'étais assis, j'eus l'honneur de vous offrir ma place. Vous me remerciâtes d'un gracieux signe de tête et vos yeux rencontrèrent les miens... Ah ! ce doux regard ! il pénétra jusqu'au fond de mon âme ; ce fut le coup de foudre, et depuis cette seconde, vous occupez toutes mes pensées. Instantanément, j'ai compris que vous étiez l'ange attendu, la vision poursuivie ! Et lorsqu'à la station Gare de l'Est, vous êtes descendue, je ne résistai pas au désir de vous suivre, mais respectueusement, sans vous importuner : c'est ainsi que je parvins à savoir votre demeure, votre nom, l'endroit où vous travaillez. Je sais que vous êtes le soutien de votre famille ; à mille beautés, vous joignez mille vertus et c'est à genoux que je voudrais vous dire mon admiration ! Oh ! comme je voudrais que vous puissiez me connaître ! Si vous lisiez au fond de ma pensée, avec quelle confiance me tendant la main, vous me diriez : "Soyons amis ! venez, soyez mon soutien, mon confident ! plus tard, peut-être mon époux !" Une nature d'élite comme la vôtre, je le devine, ne se formalisera pas d'une franchise complète et vous ne repousserez pas avec indifférence celui que le destin place sur votre route et dont l'unique ambition est votre bonheur. Permettez-moi, Mademoiselle, de mieux me faire connaître ; accordez-moi l'insigne faveur d'une entrevue ; exaucez ma prière, je vous en supplie et croyez au respect infini de Ernest C. (profession)
(adresse).
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