Matinée de repos sur la balancelle du balcon de notre chambre avec un bon bouquin dans les mains. Dans la maison, il fait bon. On ne croirait pas qu'il fait si chaud dehors. On déjeune tôt pour avoir l'après-midi devant nous. Aujourd'hui, on a décidé de visiter les fameuses Grottes de Jeita, situées au nord de Beyrouth. Comme hier, les parents d'O. nous accompagnent. Ils disent qu'ils veulent faire un petit peu de tourisme dans leur pays natal et que ça fait bien trente ans qu'ils n'ont pas été à Jeita. Mais la vérité, c'est qu'ils sont un peu inquiets à l'idée de nous laisser tout seuls : ils ont peur qu'on ne puisse pas se diriger et qu'on se perde (il est vrai que, les rares fois où il y a des panneaux, ils sont souvent marqués en arabe, langue que ni O. ni moi ne savons lire) ou qu'ils nous arrivent un accident (et il est vrai que les Libanais conduisent si mal que ce n'est pas évident d'être au volant). Mais ils oublient qu'on est grands et qu'on n'est pas si incapables que cela ! Enfin, cela ne me dérange pas d'avoir des guides particuliers avec nous : au contraire, c'est plutôt rassurant et je n'ai pas à avoir toujours le nez sur la carte. Mais le problème, c'est que cela crée des tensions entre O. et ses parents. Car on se perd et on risque des accidents tout autant (sinon plus ?) que si nous étions seulement tous les deux ! Résultat : à chaque fois qu'on est tous les quatre dans la voiture, il y a pas mal de cris - jamais méchants, mais quand même pas reposants. Mais il est difficile de convaincre O. de ne pas prendre la mouche à chaque remarque de sa mère ou à chaque coup de volant un peu brusque de son père...Nous arrivons sans encombre à Jeita. C'est certainement le site le plus visité du Liban. La preuve en est au vu des nombreuses installations touristiques : un parking bien aménagé, de nombreuses boutiques de souvenirs, une salle de projection pour un film documentaire, et puis surtout un petit train en plus d'un télésiège pour se rendre aux pieds d'une des grottes. Les deux dernières installations sont complètement inutiles, mais je suppose que les administrateurs du site - une compagnie allemande - ont pensé que celui-ci serait ainsi davantage mis en valeur. Pourtant, les grottes de Jeita n'avaient pas besoin de tant de tapages : elles sont en elles-mêmes très impressionnantes et je ne crois qu'il existe dans le monde des grottes aussi grandes et aussi riches. Autre preuve de la haute fréquentation de l'endroit est les nombreux touristes que nous croisons. Pas des hordes de Japonais avec appareils photos, comme à la Tour Eiffel, mais de riches familles des pays du Golfe. Le Liban, offrant mer et montagne, ainsi que sécurité et proximité culturelle, est la terre de prédilection des touristes de toute la péninsule arabique. Ces touristes se reconnaissent facilement, surtout du côté des femmes : elles portent la burka, long voile noir qui couvre toute la silhouette de la tête aux pieds. Si ce n'était pas si affligeant pour la condition de la femme, cela serait presque comique de les regarder manger des glaces dans cette tenue...
Jeita est composée de deux grottes situées l'une au dessus de l'autre. Quand on pénètre dans la galerie supérieure, on est aussitôt surpris par les stalactites et les stalagmites couvrant la totalité de la grotte. Le plus étonnant, c'est que la grotte est très profonde - 6 km - et qu'en n'en traversant que 700 mètres, on en voit qu'une toute petite partie. La grotte inférieure, elle, est moins longue, mais elle est encore plus particulière : traversée par une rivière souterraine, on ne peut y pénétrer que dans un petit bateau. Cela donne une atmosphère très étrange. Cela doit être génial d'assister à un concert de musique classique ici. Malheureusement, je n'ai pas de photos sensationnelles à vous montrer. Les appareils photos sont interdits dans la grotte et consignés à l'entrée. Je peux seulement mettre ici un cliché d'une statue - supposée sculptée dans les stalagmites - située à l'entrée de la grotte. On y voit tout un groupe de femmes musulmanes posant aux pieds de l'homme de pierre.
Après cette promenade de fraîcheur (il ne fait jamais plus de 16° dans la grotte inférieure), nous reprenons la voiture pour monter à Harissa, aux pieds de la Vierge du Liban qui surplombe toute la baie de Jounieh. Le sanctuaire est situé à 500 mètres d'altitude et offre une vue magnifique sur la côte. On peut y monter en téléphérique. Mais, ayant vu les cabines passant au-dessus de l'autoroute et frôlant les toits des immeubles, on s'est dit que la voiture était peut-être un moyen de transport plus sûr ! La vierge sur un monticule de pierre est visible depuis la côte. C'est également un lieu très fréquenté, non seulement par les chrétiens qui y viennent en pèlerinage, mais aussi par les touristes d'autres religions qui veulent profiter de la vue. Hélas, aujourd'hui il fait un temps tout brumeux - une chaleur lourde et humide qui semble, à tout instant, éclater en orage. Du coup, l'horizon se perd dans les nuages blancs. Mais la brume qui se mêle au coucher du soleil avec ses tons rosés vient donner un petit côté mystérieux à ce paysage de pierres et de mer.
Pour finir la journée en beauté, la voiture (de location) s'est décidée à ne plus redémarrer. On a a failli croire qu'on allait rester coincés sur la parking de Harissa. Mais on s'y est mis à tous pour pousser à l'arrière de la voiture, et finalement elle a fini par repartir. Ouf !