Un bonhomme de neige à la Calvin




pour m'écrire




























































hier demain
Dimanche 16 décembre 2001

Il fait un froid sec mais bleu. Le soleil d'hiver me fait plisser les yeux et dessine un sourire sur le coin de mes lèvres, forçant artificiellement la plissure du visage. Le froid de décembre me rentre dans les os, paralysant ma chair, pourtant emmitouflée sous de multiples écharpes. Un froid stagnant qui semble congeler le temps, donnant l'illusion qu'il est possible de retenir les jours dans une éternité immuablement présente, comme si la fausse chaleur de ce soleil inespéré immobilisait toute vie.

Chaque jour, en se levant, on regarde au thermomètre et il semble faire toujours plus froid que la veille. 0°... - 2°... - 6° C. Cela n'en finira donc jamais de baisser se dit-on ?

Pourtant, c'est étrange, à chaque moment où la température à l'extérieur baisse, il me semble remonter doucement sur l'échelle de mon thermomètre intérieur. J'ai commencé la semaine dans le froid le plus glacial : gelée par toutes ces petites choses agaçantes du quotidien qui, accumulées, prennent des allures de cataclysmes planétaires (rétro cassé par un vandale que ces chers types de chez Renault mettent 107 ans à changer + retard accumulé because épluchage de la glace sur le pare-brise à 7 heures du matin + Poulpes littéralement chiants à l'approche des vacances + rendez-vous manqué avec Copine Juju + fatigue pré-correction-de-copies, et j'en passe...), j'ai cru que je n'arriverais jamais à me réchauffer et à brûler de nouveau d'un semblant d'énergie. J'étais si lasse, paralysée dans le froid polaire de mon moral descendu au quatrième sous-sol, que j'avais l'impression que la moindre contrariété allait me faire pleurer. Peut-être que mes larmes m'auraient réchauffer, il est vrai, mais je ne voulais pas que ce soit une tristesse, si douce soit-elle, qui me redonne vie.

Et puis mon thermomètre est remonté petit à petit. J'ai changé d'air, retrouvant des gens qui tiennent à moi, devant lesquels je n'avais pas le droit de croire en mes états d'âme. Alors il s'est mis à faire un peu plus chaud en moi. Comme ça, sans raison. Juste parce que quand on est descendu très bas, on ne peut que remonter. On dirait une vraie maxime à la psychologie de bazar de Femme Actuelle, cette phrase. Mais c'est peut-être vrai, au fond. Quand on descend, on est nécessairement contraint de remonter. Car on ne peut pas concevoir de montagne sans vallée, comme dirait René.

Pour remonter sur ma montagne, je me suis surprise à croire les "tu verras" de J. "Tu verras, m'a-t-elle écrit, en utilisant un futur de certitude, tu verras, dans deux semaines, on sera au milieu de la neige, en train de fabriquer notre bonhomme de neige. Et quand on l'aura construit, notre bonhomme, bien grand, bien imposant, on lancera sur lui des tonnes de boules de neige, en se disant que ce cher bonhomme représente la somme de toutes nos haines et de tous nos énervements". Ce bonhomme de neige sera une sorte d'exécutoire de glace, ou encore une métaphore de notre propre Bouc Emissaire. Au lieu de le poursuivre à travers la ville, on tapera sur lui à coups de rires enneigés. On frappera fort, très fort, comme Calvin avec Hobbes. Hé hop, il n'y aura plus cette démangeaison intérieure, plus ce souci indépassable : ils auront tous soit fondu sous notre propre chaleur, soit été pulvérisé par notre force retrouvée.

J'ai hâte d'être face à notre Bonhomme. Heureusement, plus que neuf chocolats à manger sur mon calendrier de Noël, et enfin je me retrouverai face à lui. J'aurai le droit de lui faire toutes les misères du monde. Oui, toutes les misères du monde.

j'aime toujours pas Noël, mais j'aime les chocolats