Pourquoi lui ?
Pourquoi moi ?




pour m'écrire















































hier demain
Lundi 25 février 2002

Les amitiés que l'on a lorsqu'on est adulte sont beaucoup plus variées et inattendues que les amitiés d'enfants. Quand tu es môme, c'est facile : tes amis, ce sont des camarades de classe. Ils ont le même âge que toi, ont à peu près les mêmes préoccupations, font la même chose que toi. Parfois les parents se connaissent entre eux et souvent t'habites pas loin de chez eux. La sphère formée par le monde des amitiés est en fait très étroite. A l'image du monde de l'enfance qui, d'un certain point de vue, est vraiment tout petit, fermé sur des visages familiers et des rêves timides.

Quand tu quittes l'université, cela devient tout de suite autre chose. Tu te mets à fréquenter des gens qui ont l'âge de tes parents, qui ont d'autres priorités que toi (les enfants, la maison) ou encore qui sont passés par des expériences que toi-même tu ne connais pas encore (le mariage par exemple). Il n'y a plus cette part de connu, bien connu, chez l'autre. Les critères de référence, les rites communautaires, les souvenirs ne sont plus les mêmes. Là, ça devient vraiment l'inconnu.

Quand je me promène dans la rue avec G., j'ai l'impression que les gens qui nous croisent nous croient mère et fille. Mais non, même si G. a un fils qui est plus vieux que moi, nous sommes simplement amies. Sa vie fait le double de la mienne, et pourtant elle trouve de l'intérêt à m'écouter lorsque je parle. Est-ce que c'est cela qui est toujours si étonnant dans l'amitié ? Trouver des points de commun là où il n'y en a pas. Regarder ensemble dans la même direction, alors qu'on ne vient pas du même endroit.

Inversement, lorsque je suis avec E., qui vient de finir des études courtes et qui a tout juste la vingtaine, je me sens un petit peu comme une grande soeur. On ne voit pas le monde à partir du même point de vue. Elle ne connaît pas les sandwichs grecs de Saint-Michel et s'imagine que les pitas de la rue à côté de chez elle sont les meilleurs. Ou bien lorsqu'elle voit inscrit Jean-Pierre Léaud sur un programme de cinéma et que je lui parle de Truffaut, elle hausse les sourcils en s'écriant : "qui ça ?" Elle n'a jamais été une étudiante en lettres à Paris. Et pourtant voilà, on va au cinéma ensemble parfois et on a quand même des choses à se dire. Même si on n'a pas les mêmes armes face au monde.

Je n'arriverai jamais à savoir pourquoi... Pourquoi on s'entend avec une personne plutôt qu'avec une autre ? Qu'est-ce qui fait qu'on a envie de connaître cet individu là plutôt que tel autre ? Pourquoi des gens se trouvent alors qu'ils ne se cherchaient même pas ? Parce que c'était lui, parce que c'était moi... Mais il rigole, là, le brâve Montaigne : c'est pas une explication, ça !

Et encore, je parle même pas de l'amour ici... Ma perplexité serait encore plus grande...

inscrire le nom des gens qu'on aime sur les arbres pour ne pas les oublier