Dimanche 12 septembre 2004

Que la montagne est belle
Levés tôt aujourd'hui, car nous avons prévu une randonnée dans la montagne avec le Club des Vieux Sentiers. Cette association francophone, basée dans le quartier chrétien d'Achrafieh, organise depuis des années des balades dominicales dans la montagne. En venant au Liban, nous avions vraiment envie de faire un peu de marche, mais l'absence totale de carte IGN (quand elles existent, elles sont gardées précieusement par l'armée et, à la rigueur, prêtées aux clubs officiels de randonnée) et la méconnaissance des lieux les mieux abordables (cela ne fait jamais que quatre ans que le pays a été déminé et on préfère ne pas marcher n'importe où !) nous ont fait préférer partir dans des randonnées accompagnées. La randonnée n'est pas très pratiquée au Liban. La plupart des Libanais prennent leur voiture pour aller chez leur famille à cinq minutes et ne comprennent pas comment on peut aimer marcher juste pour le plaisir ! Pour participer à cette balade, nous avons dû refuser une invitation à un anniversaire et une autre à un baptême... au risque de se brouiller avec la famille ! Tant pis, nous assumons d'être les cousins français un peu fous qui préfèrent bien marcher plutôt que bien manger.

A 8h30, deux membres du club viennent nous récupérer sur le bord de l'autoroute. Nous montons vers le nord, du côté des Cèdres, sur les flancs du Mont Liban. La femme qui nous accueille parle parfaitement français et est une habituée des promenades dominicales. Elle nous prévient que la balade que nous avons choisie est particulièrement difficile. Nous le savions déjà, la personne qui avait pris notre inscription au téléphone nous avait mis en garde, insistant lourdement. Mais quelle est l'échelle des difficultés pour un Libanais ? Déjà, on nous avait dit que le rafting n'était pas évident, alors que la promenade ressemblait à une balade sur un fleuve tranquille en comparaison des torrents alpins !

les chèvres libanaises ne vont pas souvent chez le coiffeur !

Nous croisons sur la route un troupeau de chèvres. Enfin, les dernières personnes finissent par arriver au lieu de rendez-vous. Nous sommes près de 25, autour d'une guide. Tout le monde parle français. Il y a même une jeune femme française, presque voisine de chez mes parents, venue travailler bénévolement au Liban pendant un an. Ce n'est pas facile de marcher à 25. Mais il paraît qu'on est peu nombreux, car la randonnée est ardue - d'habitude, ils sont plus d'une cinquantaine ! La guide nous décrit la balade. 900 mètres de dénivelés positifs et autant de descente, annonce-t-elle. Nous allons grimper sur le deuxième sommet du Liban, celui qui jouxte Qornet Es-Saouda à 3 083 mètres : Dahr El Qadibi, situé à 2 700 mètres d'altitude. Nous empruntons tout d'abord un large chemin, avant d'arriver au pied d'une colline dégarnie, sèche et désertique : "Voilà, nous dit notre accompagnatrice, c'est par ici !" Je regarde, incrédule, la direction : il n'y a pas de chemin, et il faut monter à flanc de montagne, hors de tout sentier. Décidément, les Libanais font de la montagne comme ils conduisent : ils foncent tout droit, sans se poser de questions ! Tant pis si marcher sur les broussailles et les chardons esquinte la montagne. Certaines personnes ont du mal à suivre : évidemment, on monte à la verticale, avalant les dénivelés à toute vitesse, au lieu de prendre le temps de tourner en lacets autour de la montagne ! On s'arrête toutes les quarts d'heure pour attendre les retardataires - c'est un peu lassant.

vers le sommet

Heureusement, le paysage est magnifique. Nous avons l'impression de marcher dans un désert, tellement tout autour de nous est sec. La montagne ressemble à une énorme motte de terre ocre. Arrondie et dénudée, elle n'a nulle commune mesure avec les roches effilées des Alpes, ni même avec les gorges rocheuses de la Qadicha que nous avons traversé en voiture pour venir (en reprenant la même route que l'autre fois). Derrière nous, la côte se dessine - les habitations dans la montagne, le minuscule bois des Cèdres et au loin la plaine côtière et la mer. Enfin, nous voici au col : tout d'un coup, l'autre versant du Mont Liban apparaît. Nous voyons toute la plaine de la Bekaa qui s'étend avec ses champs bien alignés jusqu'aux montagnes jumelles - celles de l'Anti-Liban. J'ai comme l'impression d'avoir le Liban à mes pieds. On voit si loin là haut.

Des parapentes dans la montagne

Nous arrivons au sommet pour déjeuner, à l'abris du vent derrière un rocher. Mais je ne suis pas assez couverte. On m'avait dit qu'il y aurait beaucoup de soleil, mais il y a surtout un vent froid de montagne. C'est déjà l'heure de la descente. Elle se fait comme la montée : tout droit dans les éboulis ! Il ne faut pas avoir peur de se tordre la cheville sur les pierres glissantes.

la descente

En bas, avant de récupérer la voiture, nous passons devant une tente de bergers qui vendent du Laban - c'est-à-dire du lait caillé, comme du yaourt.

tente des paysans


Finalement, la randonnée n'était pas si difficile que ça ! J'ai même du mal à croire qu'on a monté près de 900 mètres, car cela m'a paru bien plus facile. De retour à la maison, nous sommes quand même un peu fatigués par notre journée. En fait j'ai attrapé un petit coup de froid et j'ai du mal à me réchauffer. Nous allons tout de même rendre visite à une tante pour nous excuser de notre absence au baptême de son petit-fils. Puis hop, au dodo !

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