Dès qu'on est un peu plus vieux, qu'on a un peu plus d'expérience que les autres et qu'on sait un petit mieux comment les choses se passent, on a une tendance naturelle à se prendre pour quelqu'un d'expérience, rompu aux vieilles habitudes - quelqu'un qui s'y connaît, en d'autres termes. Et puis, dès que la nouveauté soudain surgit, voilà qu'encore une fois qu'on se sent tout petit.
Aujourd'hui, c'était la rentrée des professeurs. J'ai marché d'un pas un peu plus assuré que l'année dernière vers mon lycée. Les découvertes ne me tombaient plus brusquement dessus, mais je parvenais enfin à les aborder avant qu'elles ne me surprennent. En voyant les petits stagiaires de l'Ecole des Profs, j'ai même eu un sourire attendri. Il y avait une fille qui avait l'air paniquée lorsque le proviseur a abordé les questions de discipline. Je me suis dit que l'année dernière je devais avoir le regard qu'elle avait aujourd'hui.
Mais... Nouveau lycée, nouveaux collègues, nouveaux locaux, nouveaux élèves, nouveaux règlements, nouveaux problèmes. On recommence, mais on ne reprend pas les mêmes. Je n'ai pas encore retenu tous les visages, et encore moins les noms dans la centaine de collègues que j'ai pu rencontrer aujourd'hui. Je ne suis pas sûre non plus de parvenir à me rendre à la salle de classe demain sans me tromper au moins une fois de chemin. Et je me demande encore une fois si je serai à la hauteur. Et puis, comme d'habitude, je suis en retard dans mon travail... Minuit, et je termine tout juste mon cours pour demain matin. Je reprends mes presque déjà vieilles habitudes...
Demain, c'est la rentrée des élèves. Là, on va passer aux choses sérieuses... J'ai jusqu'à demain matin pour me convaincre que je suis moi-même un prof d'expérience. Ca m'étonnerait que j'y arrive. J'essaierai au moins de faire en sorte qu'on ne voit pas la panique dans mon regard. Ben oui, être paniquée un jour de rentrée des classes c'était bon quand j'étais jeune (c'est-à-dire l'année dernière)... Plus maintenant !