Mercredi 16 octobre 2013

Sein ou biberon

3kg600 sur la balance de la pédiatre ce matin. La Crevette grandit et grossit bien. La malédiction des problèmes de poids de sa sœur à sa naissance semble enrayée. O. au téléphone me dit, Tu vois, tout va bien, tu dois être soulagée. La pédiatre observe la Crevette, met ses doigts dans les siens pour voir si elle les agrippe, fait bouger son regard, la mesure avec le grand mètre en bois (50 cm). Elle lui caresse même la joue avec douceur, dans un geste maternel, et lui dit Bravo ma cocotte. Moi, à côté, je regarde ses yeux foncés qui nous regardent. Ces yeux si profonds dans lesquels il me semble si souvent me noyer. Continuez comme ça puisque ça marche ! me dit le docteur. Le sein, plus ensuite le biberon (lait maternel généralement). Je hoche la tête. Puis je remets le petit pull bleu à rayures dans les minuscules bras de la crevette, avant de la glisser dans le grand manteau rose à la capuche de fourrure. Au-revoir docteur,  À dans trois semaines !

Dehors, il fait froid. Il y a une petite bruine glacée. Je n'ai pas eu le temps de mettre ma casquette ce matin - m'occuper de la grande, de la petite, pas le temps de m'occuper de moi. De retour à la maison, j'appuie machinalement sur le bouton de la télévision. Les programmes sont pathétiques. Je ne sais pas pourquoi j'allume le téléviseur. Peut-être pour combler ma solitude ? La Crevette ne tarde pas à se réveiller. Je vais la chercher. Elle a faim. Depuis ce matin, il me semble qu'elle a tout le temps faim. Je me suis mis dans la tête que c'était sûrement un pic de croissance. Je la mets au sein. Enfin, depuis quelques jours je n'ai plus ces horribles crevasses qui m'ont fait tant souffrir. La Crevette tète cinq minutes goulument, puis s'endort. Je la fais glisser jusqu'à son transat, mais elle se réveille, réclame à nouveau. A nouveau le sein, à nouveau l'endormissement les lèvres recouvertes de lait quelques minutes plus tard, le sourire béat. Mon dos me fait horriblement mal et je traîne toujours cette fatigue qui pèse trois tonnes. Au bout d'une heure, je vais chercher un biberon. La Crevette tète un peu, puis s'endort, apaisée. Jusqu'à quand ?

Je ne sais plus très bien. Sein, biberon ? Ce double choix qui n'en n'est pas vraiment un commence à me peser. La nuit, O. préfère se lever pour donner le biberon. Cela va plus vite, dit-il. Le jour, je suis là avec mes dilemmes. Continuer l'allaitement maternel, car enfin après presque un mois de problèmes et de combats, cela semble enfin fonctionner. Continuer le biberon, car je peux goûter une liberté qui me permet d'envisager de sortir ou tout simplement de m'occuper de la Sardine sans avoir à faire passer sa sœur avant elle. Arrêter l'allaitement maternel, car je suis très fatiguée, je doute beaucoup (ai-je assez de lait ? n'en ai-je pas trop ? et si les crevasses revenaient ? et si je n'arrivais jamais à me passer de biberon complémentaire ?) Arrêter le biberon, car j'ai l'impression de courir deux lièvres à la fois, comme si je n'arrivais pas à choisir mon camps (comme s'il y avait deux camps).

Il pleut toujours dehors. Une pluie fine et grise. L'hiver est bientôt là. Peut-elle va-t-il recouvrir mes doutes. J'aimerais bien savoir. Savoir ce que je veux vraiment.

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