Mercredi 9 mars 2011

Au début

O. a repris le chemin du travail et me voici devenue mère au foyer à plein temps. Depuis lundi, je n'ai pas pleuré et j'ai bon espoir que l'angoisse des premiers jours se soit enfin envolée. Au début, j'avais le sentiment que je n'y arriverais jamais. À table ou dans le lit, je coinçais une larme contre ma paupière, incapable de retenir ce flux lacrymal qui sortait de moi. "Mais pourquoi tu pleures ?", répétait O. Et mes larmes redoublaient, se heurtant à l'incompréhension et à l'impossibilité de dire. Au début, je n'étais pas tout à fait mère. O. était là et prenait toute la place. Il était le père et la mère tout à la fois. Un body maculé de caca en raison d'une couche mal fixée, un biberon trop froid, les pressions du pyjama fixées à l'envers... et O. qui s'énervait, me rappelant à l'ordre. "Mais enfin, tu ne sais toujours pas faire après dix jours ? Regarde, apprends, fais comme moi !" O., qui n'y connaissait rien en bébé dix jours plus tôt, entendait me donner des leçons. Mais plus il me critiquait, plus je me crispais, me sentant crouler sous le poids de mon constat apparent d'incapacité. Je m'énervais moi aussi, me défendais. "Ce n'est pas ma faute si j'apprends lentement !" ou "laisse-moi faire à ma façon !" J'ai mis quelques jours à comprendre que O. prenait ma place de maman et qu'à vouloir lui-même trop bien faire, il ne me laissait pas la possibilité de prendre enfin mon rôle.

Mais la société marque bien les places de chacun. Au bout de onze jours, le papa doit retourner travailler et la maman doit rester à la maison pendant de longues semaines. Pas le choix : c'est ainsi que les rôles sont répartis, même si le papa a l'âme d'une maman. Me voilà seule aux commandes. J'ai récupéré mon retard d'apprentissage de mes tâches de parent et je sais que, de jour en jour, je vais désormais prendre de l'avance sur O. Je suis là, tout le temps, à chaque minute. Hier, la Sardine a trouvé pour la première fois son pouce pour le mettre dans sa bouche. J'étais fière de ce geste anodin, comme si c'était un exploit. J'ai pris une photo pour la montrer le soir à O. Ce matin, la Sardine a suivi du regard le petit lapin rose à clochette qui est dans son lit. J'étais fière une nouvelle fois et je me suis dit que je montrerai cela à O. ce soir, à son retour. Je suis maman à temps plein. O. est papa de 18 heures à 8 heures, et parfois aussi dans la journée quand il téléphone, inquiet.

Au début, j'avais la nostalgie des mois de grossesse. Je regardais mon ventre vide dans le miroir de la salle de bain, triste à l'idée qu'il n'était plus habité. Dans un câlin, O. caressait mon ventre mou en disant : "il est où le bébé ?" Et je répondais : "il n'est plus là, il est dans son lit !" Doucement, cette nostalgie s'en va, et avec elle les stigmates de la grossesse (les kilos, le sang qui coule, la ligne brune sur le ventre). Mais il m'arrive encore de regarder mes habits de grossesse, devenus trop grands, avec un certain regret. En n'étant plus enceinte, c'est comme si j'avais perdu cet état de grâce qui rendait ma vie exceptionnelle. J'étais deux. Je ne suis plus qu'une. Mais pas encore totalement finie pour autant. Maman à temps plein, mais encore en construction.

(Merci pour vos messages de félicitations !
Excusez-moi si je ne suis pas prompte à répondre !)

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